Masao Obata naît dans une petite île sacrée de la baie d’Hiroshima. Il a 2 ans quand l’enfer s’abat sur le Japon. Après le divorce de ses parents il est élevé par sa mère. Il exerce de nombreux métiers subalternes qu’il doit interrompre pour cause de problèmes psychiques. A l’âge de 31 ans il est interné dans un hôpital psychiatrique. A la mort de sa mère et après un long séjour dans cette institution il rejoint son père à Kobe. Lorsqu’il meurt il est à nouveau placé dans un centre de soin. Si sa vie est rythmée par des internements successifs elle est aussi animée d’une volonté inébranlable de dessiner. Dessiner sur des cartons de récupération toujours au crayon de couleur d’un rouge de guerre. Son travail est découvert par le peintre Kaji Higashiyama qui le présente au public. Il est aujourd’hui conservé dans diverses collections publiques, cinquante pièces ont fait l’objet d’une donation à la collection abcd.
Masao Obata est l’une des figures les plus importantes et les plus populaires de l’art brut au Japon. Il commence son œuvre en 1989 lorsqu’il intègre le centre pour malades mentaux à Hifumien dans la Préfecture de Hyogo. Il utilise des cartons d’emballage qu’il coupe à la taille souhaitée pour servir de support à ses dessins. Il consacre tout son temps à dessiner et très vite son espace vital est envahi, au point qu’il doive se contortionner pour trouver la place pour dormir. Avant 2000 il représente toutes sortes de thèmes (avions, camions, navires, trains, ponts, objets usuels etc.) et petit à petit il se consacre essentiellement à la représentation de figures humaines, le plus souvent des couples. Il lui arrive de représenter un homme au recto du support et une femme au verso. Lorsqu’on lui demandait pourquoi il dessine des couples, il répondait: « Une femme peut-elle épouser une femme? Ce serait difficile, n’est-ce pas? Par exemple, pourraient-ils avoir un enfant ensemble? C’est pourquoi il doit y avoir un homme. Il y a un homme et il y a une femme. N’est-ce pas naturel? ». Il opte pour l’épure et la symétrie iconique qui semblent traduire sa vision du monde.
Tadashi Hattori, historien de l’art, Université Konan, Japon