Marcel Bascoulard a 19 ans lorsqu’il assiste au meurtre de son père par sa mère. Très vite il se clochardise, logeant dans des abris précaires dans le quartier Avaricum, à Bourges. Il finira ses dernières années dans la cabine d’un camion offert par le propriétaire d’une casse. Il apprend par lui-même à dessiner. D’une façon systématique il représente les rues de sa ville, des rues dépeuplées aux larges perspectives d’où émane une sorte de vertige réaliste. Admiré et réprouvé, asocial et excentrique, il aime s’habiller en femme, dans des robes qu’il confectionne parfois lui-même. Dans l’une de ses lettres, il confie: « Si je me promène en tenue féminine, c’est que j’est me (sic) cette tenue plus esthétique. Pour les besoins de l’art, lorsque je revêts la tenue féminine, je prends avec moi mon appareil photographique et je fais faire des clichés de moi-même par des gens de connaissance. »
Demeurant à deux pas du Studio photo Morlet, Bascoulart commence à se faire photographier dans les années 1940. Sur ces photographies aux bord crantés et de petits formats, l’expression du visage est toujours la même: le visage légèrement penché et sans maquillage. La taille marquée, la jupe gonflée par des jupons, il prend l’allure d’une jeune fille bonne à marier. Parfois il est une ménagère en tablier, avant de se transformer, plus tard, en élégante bourgeoise. Les modes passent, sa silhouette se tasse et ses cheveux blanchissent. En 1970, on le découvre affublé d’un tablier de skaï noir pour ressembler à un guerrier samouraï. Etrange détail que ce miroir brisé qu’il tient à la main, sur chaque cliché.
Marcel Bascoulard se met en scène, crée une galerie de personnages dérangeants – écho d’une mère meurtrière (?) – marginal, il se fait accepter par la société grâce à l’autre, celui qui le prend en photo.
Le 12 janvier 1978, il est assassiné à Asnières-lès-Bourges, au lieu-dit Les Gargaudières, étranglé par un marginal de 23 ans.